08/08/2024 0 Commentaires
Noël, une donnée immémoriale de ma vie
Noël, une donnée immémoriale de ma vie
# Prédications
Noël, une donnée immémoriale de ma vie
Veillée de Noël des familles, 24 décembre 2022
Qu’est-ce que c’est que d’être né ? Nous avons incontestablement en commun le fait que nous soyons tous nés d’une femme, quel que soit ensuite notre condition humaine, notre âge, notre parcours de vie et notre façon d’être. Et pourtant, qui de nous saurait répondre à cette question : qu’est-ce que c’est que d’être né ?
Car nul ne pourra y répondre par sa propre expérience ; le fait d’être né ne se communique pas par un souvenir de sa naissance. Aucun de nous ne pourra dire personnellement, par lui-même, comment s’est passé sa naissance ; qui y était ; quelle en fût l’histoire.
Car la naissance est bien le premier élément de cette double donnée immémoriale de la vie humaine. Ma naissance et ma mort sont aux confins de ma conscience de vivre ; je ne saurais connaître ni ma naissance, ni ma mort.
Ma naissance ouvre mon être et le précède en même temps. Je peux l’oublier, je peux la maudire ; je peux lutter avec mes origines, je peux contester ma filiation, je peux demander à être dispensé légalement de mon obligation alimentaire à l'égard d’un parent indigne ; mais de la même manière que je ne peux renier mes parents, je ne peux nier ma naissance. Béni(e) celle et celui qui peut honorer ses parents, en reconnaissant sa naissance !
Et ce simple fait que Noël signifie « jour de naissance » nous échappe curieusement dans les préparatifs et les traditions de la fête. On dit souvent que Noël, c’est la fête de la lumière, la célébration de la famille, le festin du partage, la réjouissance de la paix… On a besoin de déguiser quelques pauvres stagiaires en Père Noël devant les magasins pour créer la « magie de Noël »… On mange des quantités inimaginables de bredela, bredele, maenele et maenela ; on supporte le marché de Noël, l’odeur du vin chaud, la bataille des cadeaux… tout ça - pour entendre, le soir de la veillée : c’est d’une naissance qu’il est question à Noël. Là encore, contrairement à ce qu’on entend souvent, - que Noël serait fait de souvenirs d’enfance - le vrai mystère de Noël est celui d’une naissance dont je ne me souviens absolument pas !
J’entends simplement, ce soir encore par l’Evangile, qu’il s’agit d’une naissance d’un enfant dans lequel Dieu reconnaît notre humanité ; une naissance par laquelle Dieu me dit sa présence dans ma vie. L’expérience chrétienne se cultive par la reconnaissance et la confiance que ma naissance et ma mort sont aux confins de la présence de Dieu. Noël est bien la petite soeur du Vendredi Saint ; la naissance du Christ ne saurait être comprise sans sa Croix.
Noël me parle de ma naissance comme d’un don, comme d’une donnée immémoriale de ma vie. Même si je ne m’en souviens pas personnellement, je suis né d’une femme. L’Evangile raconte de manière subtile et merveilleuse que moyennant ma naissance - comme en vue de ma mort -, la présence de Dieu fait partie de ces données immémoriales de ma vie.
Aucun oubli de Dieu, aucune malédiction spirituelle, aucune lutte avec les origines et les réalités religieuses, aucune contestation de ma filiation chrétienne ne pourront effacer la présence de Dieu dans ma vie. De la même manière que je ne peux nier ma naissance, je ne peux renier l’enfant né pour moi dans l’histoire de Noël. Béni(e) celle et celui qui peut honorer l’enfant dans lequel Dieu reconnaît notre humanité !
Sa présence n’est jamais une évidence, une banalité dont on pourrait produire des preuves prétendues scientifiques. Aucune preuve de l’existence ou démonstration de l’inexistence de Dieu ne sauront se substituer à la simple présence dont le manque se fait davantage sentir que la suffisance dans notre vie. « N’importe quoi peut servir de Dieu quand Dieu manque », écrivait le poète Christian Bobin qui vient de nous quitter.
Comme dans l’histoire de Noël, la présence de Dieu se communique singulièrement par la vulnérabilité des humains que je préfère souvent ignorer. Ma propre naissance a bénéficié d’une assistance et d’une protection sans lesquelles je ne serais pas là ce soir.
Aussi la fête de Noël est, tous les ans, l’occasion d’apporter notre secours à ceux qui ont en besoin. Au Temple Neuf, comme dans d’autres paroisses de Strasbourg, nous apportons notre aide à des enfants qui naissent dans des conditions moins privilégiées, à travers le travail de l’association Les Disciples. Comme tous les ans, nous allons suspendre au sapin les « Coeurs en fête » qui portent chacun le nom d’un enfant de Cronenbourg-Cité ; notre offrande leur sera destinée.
En écoutant le récit de la naissance du Christ, c’est le mystère de notre propre rédemption qu’il nous est donné de contempler : le nourrisson qui dort dans la mangeoire de la crèche, c’est aussi chacune et chacun de nous. Sous le regard aimant du Père, nous n’avons rien à craindre de la vie qui s’ouvre devant nous, au matin de Noël et tous les matins de la vie. Amen !
Commentaires