08/08/2024 0 Commentaires
Une parabole contre la résignation
Une parabole contre la résignation
# Prédications
Une parabole contre la résignation
Prédication du culte 'Grâce matinée' du 13 novembre 2022
Qu'un certain Fils de l'homme vienne, assis sur le trône de sa puissance rayonnante, entouré de ses anges pour juger les nations, c'est une vieille idée apocalyptique qui ne convient plus guère à notre époque éclairée !
Bien que ce ne soit pas tout à fait vrai : aujourd'hui encore, nous ne voulons pas totalement renoncer aux adorables petits anges, mais pas en tant qu'accessoires décoratifs dans une sorte de tribunal international.
Bien sûr, le rêve d’une justice finale, qui finalement fera triompher les justes sur les injustes, n’a pas disparu - le petit film nous l’a encore montré :
Aussi, ce qui peut nous offusquer dans la parabole, c'est la froideur implacable avec laquelle les humains sont jugés dans ce tribunal apocalyptique. Il n'y a plus de rétractation possible ; la dernière instance a décidé du bien et du mal. « Ils s’en iront, ceux-ci au châtiment éternel, et les justes à la vie éternelle. ». Ici, il n'y a pas de si et de mais, mais seulement « A ou B ».
Franchement : Devons-nous vraiment expliquer à Dieu lui-même la conception chrétienne de l'homme ? Nous nous efforçons - plus ou moins - de ne pas peindre la vie humaine en noir et blanc, de ne pas juger trop vite, de ne pas condamner si possible ; nous reconnaissons nos erreurs et celles des autres et essayons de pardonner - et que fait Dieu ? On dirait qu’il se facilite un peu trop la tâche lorsqu'il s'agit de juger…
Dans ce jugement dernier, nous devons bien comprendre que ce n'est pas la foi qui compte, mais uniquement les actes. Eh bien, si ce n'est pas un coup de poing dans notre estomac de protestants ? Depuis Luther au moins, nous affirmons que Dieu nous aime, nous pauvres pécheurs et pécheresses, que nous sommes justifiés par la foi seule, par la grâce que Dieu nous accorde en Jésus-Christ !
Certes, c’est un rempart que Dieu, un invincible armure… mais Dieu ne nous protège pas de sa propre exigence : il exige en effet de chacun de nous un engagement, une vie spirituelle active et en actes. Le texte nous dit quatre fois ce que nous pouvons et devons faire : nourrir les affamés, donner à boire aux assoiffés, accueillir les étrangers, vêtir les nus, visiter les malades et les prisonniers. Si nous faisons cela, dit le texte, alors nous sommes justes. Est-ce une prétention vraiment si difficile à faire valoir ?
Car par son caractère simple et clair, l'exigence de Dieu à notre égard devient en même temps une promesse. Il ne nous est pas demandé d'accomplir des actes surhumains, mais de nous laisser toucher par la détresse de nos semblables et de reconnaître les personnes dans leur vulnérabilité.
Et ces efforts d'amour ne sont jamais vains ; ils agissent même contre toute apparence. Les apparences peuvent en effet être trompeuses. Car ce n'est pas seulement un roi ou une reine qui se cache dans les plus petits, mais le roi Jésus-Christ. -
Un autre aspect de la parabole est intriguant : Jésus apparaît comme un juge juste, mais pas du tout neutre - il fait justement ce qui serait considéré comme inadmissible dans la vie juridique profane. En effet, il ne juge pas "sans égard à la personne", mais en regardant la personne, en la regardant attentivement et en la reconnaissant. Il la reconnaît comme celle qui a agi avec bienveillance à son égard. Il ne juge pas les hommes d'après leurs actions générales, d'après tout et n'importe quoi, mais d'après ce qu'ils ont fait pour lui, même si c'est peut-être involontaire. Ce juge est totalement partial.
Or ce n'est pas ce que le Christ représente pour nous qu'il prend pour critère de son jugement, mais ce que nous représentons pour le Christ : c'est ce qu'il prend pour critère de jugement, et nous avons toutes les raisons de croire qu'aucun humain ne lui soit indifférent. Car le bien que nous faisons, que nous oublions nous-mêmes trop vite et que nous considérons parfois trop peu, pour avoir si peu de consistance et de substance dans notre monde, il ne l'oublie pas.
Cette parabole peut ainsi nous empêcher de sous-estimer nos propres actions. Il nous empêche de nous résigner face aux circonstances et de capituler devant ce que l'on appelle les contraintes. Dès l'instant où nous nous engageons en faveur de personnes peu considérées, faibles et privées de leurs droits, nous pouvons contribuer à redresser leur dignité et leurs droits, et nous donnons ainsi une place à la justice - ici et maintenant.
Oui, nous pouvons créer un espace de justice dans ce monde ! Il ne s'agit pas seulement d’une justice partielle comme la justice intergénérationnelle, la justice fiscale, la justice éducative, mais de la justice totale de Dieu. En faisant cela, nous donnons de l'espace à Dieu dans ce monde qui est le sien, car il dit : "Je vous le dis en vérité, de même que vous avez agi envers l'un de ces plus petits de mes frères et sœurs, c'est ainsi que vous avez agi envers moi". Et il ne l'oubliera pas.
Cependant, nous aussi ne devrions pas l'oublier. Nous ne devons pas obstinément essayer à identifier Jésus-Christ dans chaque homme, chaque femme, chaque enfant ; nous serions probablement dépassés. Aussi, nous ne pouvons pas rendre justice à cette personne, si nous ne nous tournons pas vers lui, mais essayons seulement de regarder à travers lui vers le Christ. L’autre est une figure du Christ seulement s’il devient vraiment notre vis-à-vis, seulement si nous regardons son visage, si nous le percevons comme une personne et si nous le prenons au sérieux. Cette personne elle-même peut alors nous considérer comme un juste ou une juste. Et - nous pouvons le croire - c'est de cette manière, avec ces yeux, que Jésus-Christ, le Fils de l'homme, nous regardera et nous reconnaîtra.
Ainsi, notre action ici et maintenant et au-delà de l'ici et maintenant a un effet - Dieu nous fait confiance pour être des justes, il nous fait confiance pour vivre en communion entre nous et avec lui. Nous pouvons espérer qu’ainsi, nous ne nous retrouverons pas devant le néant, mais devant un juge juste, qui est notre frère - devant le visage humain de Dieu. Nous nous trouvons devant le Dieu qui veut rencontrer tous les hommes, qui cherche la communion avec tous. Et nous pouvons croire que son amour va plus loin que notre imagination humaine ! Amen.
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