Que faisons-nous quand nous célébrons? (2)

Que faisons-nous quand nous célébrons? (2)

Que faisons-nous quand nous célébrons? (2)

# Prédications

Que faisons-nous quand nous célébrons? (2)
Prédication du dimanche 28 août 2022

Pratiquez-vous le binge, chers amis ? Attention, c’est du franglais ! Êtes-vous adepte du « binge watching », expression formée par le mot anglais « binge », qui signifie « se saouler » ou plutôt « se goinfrer » dans ce cas, et le verbe « watching » pour regarder l’écran, et qui évoque le fait de visionner en cascade et sans s’interrompre un grand nombre d’épisodes d’une série, voire son intégralité.

Ou bien êtes-vous plus porté vers le «binge eating», lors duquel de grandes quantités de nourriture sont ingérées dans un court laps de temps, ce qu’on l’appelle en français hyperphagie

Ou bien risquez-vous, de temps à autre, votre santé pour une séance de «binge drinking», dont je n’ai pas besoin de vous illustrer le fonctionnement...

Soyez rassuré, pas besoin de vous dévoiler : je pense que chacune et chacun cultive son jardin secret pour y trouver des manières de se sentir vivant. Car toute activité pratiquée «à volonté» peut être considéré par ce critère, que ce soit la lecture, le sport, la méditation. Après tout, et malgré les abus et périls, même les pratiques à risque ont une fonction réelle dans la vie : elles augmentent le sentiment d’être vivant. Elles créent une sorte d’explosion de la vie, elles agrandissent les traits de la vie et font ainsi grandir, et souvent aussi — c’est ça le drame — grossir.

Une célébration chrétienne peut-elle vraiment prétendre concurrencer des manières de se sentir vivant aussi addictives que le binge watching, le binge reading, le binge eating? Pouvez-vous imaginer pratiquer le «binge-prier», le «binge-chanter», le «binge-prêcher»? C’est bien sûr absurde.

Car à la différence des pratiques du «binge», une célébration chrétienne comme le culte protestant s’appuie sur des manières de se sentir vivant qui s’apprécient par la modération.

Le culte nous fait parler avec modération, sachant que trop de paroles tuent la parole; il nous invite à joindre les mains, non pas pour rester accroupi religieusement, mais pour ensuite ouvrir les mains et les utiliser; le culte est une manière d’être réunis, non pas pour nous enfermer dans un groupuscule, mais pour nous envoyer dehors; une célébration eucharistique consiste à manger, non pas se goinfrer d’aliments, mais pour goûter à la vie; la célébration invite à s’embrasser pudiquement, pour nous bénir.

Ainsi nous pouvons méditer les cinq pratiques dont vous trouvez les panneaux côté Cathédrale.

  • parler

La célébration met en scène un dialogue : après avoir reçu la parole, l’auditeur la prend pour sortir de soi, en se tenant dans l’espace d’une parole qui n’est pas la sienne

Une célébration chrétienne est conduite par un officiant, qui est généralement, dans le protestantisme, un.e pasteur.e. Mais la parole ne lui est pas réservée : toute l’assemblée prend la parole, dans la prière et la confession de foi, et les lectures et la prédication peuvent être faites par des auditeurs préparés à porter la parole.

  • joindre les mains

Il n’y a rien à faire, juste à laisser faire : joindre les mains, c’est rejoindre les autres.

L’assemblée des auditeurs qui se réunit pour une célébration est différente de toute autre forme associative : le fait de se considérer comme «convoquée» (= Église) est de l’ordre d’un événement qui renvoie à l’action de l’Esprit. L’attitude participative à la célébration en est le reflet : joindre les mains signifie rejoindre l’assemblée des auditeurs.

  • être réunis

La célébration, vécue comme un refus de toute fermeture à l’Autre, met en pratique l’ouverture aux autres

La louange monte vers Dieu en passant par les liens qui réunissent les membres d’une assemblée entre eux. Mais «les autres» ne sont pas seulement ceux qui sont «dedans»; la célébration vécue «à cœur ouvert» inclut aussi ceux qui sont «dehors»; la prière ne saurait s’enfermer dans l’enceinte d’une église.

  • manger

Toute nourriture confine au sacré; manger est un acte d’amour pour lequel la célébration apprend à rendre grâce, littéralement. L’eucharistie, la Cène marque la reconnaissance du vivant.

Quand on cherche dans le Nouveau Testament quelle fut l’inspiration spécifique de la liturgie chrétienne, qui la différencie des autres cultes et s’impose à toutes les confessions chrétiennes, on ne trouve rien d’autre que le rite du repas fraternel. Célébrer la communion du Christ et manger ensemble sont intimement liés.

  • embrasser

Même si le Geste est souvent négligé (et rendu rare en temps de pandémie), l’accolade fait partie de la célébration. Elle exprime l’amitié et se conclut par la bénédiction : la paix soit avec toi!

En français, le mot «bénédiction» signifie «dire du bien». En recevant la bénédiction de Dieu, les participants à la célébration sont invités à se bénir mutuellement : «Je te veux du bien, c’est bien que tu es là». Qu’est-ce que l’amour selon la foi de Dieu sinon de faire du bien, et d’embrasser son prochain? Amen!

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